Lettre ouverte à Michèle Rivasi – Pr Olle Johansson, 28 février 2023

Texte intégral traduit en français.

A l’heure où toutes les personnes intolérantes à la pollution électromagnétique se battent ou espèrent que cette intolérance sera bientôt reconnue et prise en compte par les pouvoirs publics, un débat s’ouvre sur la MANIÈRE de reconnaître cette intolérance. Certains souhaitent que l’EHS soit reconnue comme une déficience fonctionnelle, d’autres qu’elle soit répertoriée comme une maladie. Dans les deux cas les conséquences pour les personnes EHS ne seront pas du tout les mêmes. Dans sa « Lettre ouverte à Michèle Rivasi », le Pr Olle Johansson met en garde sur les dangers d’une reconnaissance en tant que maladie.

Nous avons choisi de publier le texte de cette lettre dans son intégralité pour donner à réfléchir et nous invitons Michèle Rivasi à lui répondre.

Magali Lesure
Fondatrice de Cœurs d’EHS

Chère Michèle,

Ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vus ! J’espère que vous allez parfaitement bien et que votre travail va dans la bonne direction. J’ai même appris que vous aviez fêté votre anniversaire il y a quelques semaines, alors, s’il vous plaît, acceptez mes félicitations les plus cordiales pour cela !

La raison pour laquelle je vous écris est que j’ai été informé – par un groupe de personnes ayant une déficience fonctionnelle d’électro-hypersensibilité – de votre atelier au Parlement européen, le mardi 7 février 2023, de 18:30 à 20 : 30, à Bruxelles, Belgique (avec l’organisation « Europeans for Safe Connections »), pour promouvoir l’ « ICE Stop 5G » ainsi que pour mettre fin à l’initiative phare 2030 Hexa-X de la Commission européenne, qui est une vision Ericsson/6G et un tissu intelligent de facilitateurs technologiques reliant les mondes humain, physique et numérique, ce qui signifie pratiquement qu’il n’y a pas d’endroit où se cacher – et pas de protection future – pour les personnes souffrant de déficience fonctionnelle d’électro-hypersensibilité, comme vous l’avez déjà compris.

Votre important atelier peut se terminer très bien pour les personnes souffrant de troubles fonctionnels liés à l’électro-hypersensibilité. Ou bien il les rapprochera encore plus d’une médicalisation tant redoutée. Et, comme vous l’avez également bien compris, la médicalisation d’un groupe peut facilement le psychiatriser avant que nous ne nous en rendions compte. Ce n’est pas sorcier, c’est bien documenté dans l’histoire de l’humanité avec d’innombrables exemples d’atrocités anciennes et récentes à l’encontre de certains groupes, même jusqu’aux célèbres procès de Nuremberg qui ont porté sur les horribles façons dont les personnes souffrant de déficiences fonctionnelles ont été « traitées » dans l’Allemagne nazie. Et nous ne voulons plus jamais faire un seul pas dans cette direction, n’est-ce pas ?

En outre, j’ai d’autres préoccupations concernant les affirmations incorrectes contenues dans la description de l’atelier concernant la déficience fonctionnelle de l’électro-hypersensibilité, d’une part, et la prétendue revendication d’une « utilisation plus sûre des télécommunications sans fil », d’autre part. Toute utilisation ne peut être que sûre ou dangereuse, le terme comparatif « plus sûre » n’a aucune signification, et certainement pas pour un groupe de personnes souffrant de déficiences fonctionnelles. La vie de ce dernier groupe ne peut pas devenir plus sûre en raison de certaines décisions auxquelles il n’a pas participé lui-même (voir ci-dessous). En outre, et il faut bien le comprendre, les personnes souffrant d’une déficience fonctionnelle ne recherchent pas une situation « plus sûre », mais une situation totalement accessible, ce qui est très différent, pour ne pas dire plus.

1. Quelques rappels et précisions importants concernant la déficience fonctionnelle électro-hypersensibilité et son statut juridique :

Je suis d’autant plus inquiet que j’ai été alerté par plusieurs personnes électro-hypersensibles sur les différents projets de médicalisation des personnes atteintes de la déficience fonctionnelle électro-hypersensibilité qui ont eu lieu ces derniers mois dans plusieurs pays européens, notamment en France, en Allemagne, en Italie, en Angleterre et en Suède.

Ils constatent avec consternation que de nombreux administrateurs et présidents de diverses associations demandent aux autorités de reconnaître l’électro-hypersensibilité comme une maladie, alors que cette condition est déjà reconnue comme une déficience fonctionnelle dans ces pays, et – selon la définition donnée par les lois spéciales sur les droits de l’homme pour les personnes souffrant de déficiences fonctionnelles – en fait dans tous les pays de l’ONU. Les administrateurs et présidents de ces associations lancent ce projet de leur propre initiative, sans qu’il s’agisse d’une demande de l’ensemble de leurs membres. Ceux qui ne sont pas d’accord sont ostracisés et rendus invisibles, leur voix et leur image de personnes saines, qui identifient les ondes électromagnétiques, sont mises à l’écart. Les personnes en désaccord sont ostracisées et invisibilisées, leur voix et leur image d’individus sains, qui identifient l’environnement pollué par le(s) champ(s) électromagnétique(s) comme le véritable coupable, et qui expriment un comportement d’évitement biologiquement correct, sont niées. Dans le même temps, les associations qui sont censées les défendre ne font rien en ce qui concerne les mesures d’accessibilité et la défense de leurs droits humains.

Il est clair qu’en 2023 ces associations risquent de ne plus représenter du tout les personnes électro-hypersensibles en général, d’où peut-être la diminution constante du nombre de leurs membres. En outre, comme il est indiqué dans le programme de l’atelier, si les personnes souffrant de troubles fonctionnels liés à l’électro-hypersensibilité représentent numériquement environ 25 millions d’individus en Europe (et sont estimées à au moins 350 000 000 dans le monde), nous pouvons conclure, de facto, que le nombre total de membres de toutes ces associations de « défense » de l’électro-hypersensibilité (susmentionnées) est très faible, à savoir quelques milliers d’individus seulement dans toute l’Europe, et qu’elles ne représentent donc pas l’ensemble de la communauté des électro-hypersensibles, mais seulement une très petite fraction d’entre eux. Il est peut-être temps de faire revivre la célèbre citation de Winston Churchill, mais en l’habillant légèrement différemment : « Jamais, dans le domaine des conflits humains, un si grand nombre n’a dû aussi peu à un si petit nombre ». Au nom de la démocratie et des droits de l’homme, il n’est pas possible qu’un petit nombre de personnes dictent quoi que ce soit à un groupe de 350 000 000 de personnes souffrant d’un handicap fonctionnel – cela va totalement à l’encontre des valeurs fondamentales des lois des Nations unies sur les droits de l’homme, qui soulignent le statut individuel de chaque personne souffrant d’un handicap fonctionnel, et que les besoins en matière d’accessibilité sont uniquement privés, personnels et individuels, même si, bien sûr, ils ont souvent un impact sur la société en général dans une perspective de groupe.

Dans la description du programme, vous parlez également de « personnes souffrant d’électro-hypersensibilité, un état chronique de neurodéficience », ce qui implique que vous considérez cela comme une maladie, une blessure ou les effets d’un médicament ou d’un autre produit chimique (cf. ci-dessous).
Selon le Dictionnaire de psychologie (!), une neurodéficience est définie comme « tout état marqué par une perturbation du système nerveux résultant d’une maladie, d’une blessure ou des effets d’un médicament ou d’un autre produit chimique ». La population mondiale actuelle de personnes souffrant d’électro-hypersensibilité en est-elle consciente… et sait-elle ce que vous pensez d’elle ?

Je n’ai connaissance d’aucune preuve de l’existence d’une telle affection neurologique. Sur la base de quelles études tirez-vous cette conclusion très ambitieuse ? Les symptômes de l’électro-hypersensibilité sont réversibles, de même que les biomarqueurs, dès que la source de champs électromagnétiques artificiels est retirée, ce qui signifie, par définition, qu’il ne s’agit pas d’une pathologie, mais d’une réaction d’évitement à un environnement inférieur, ce qui est la définition clé d’une déficience fonctionnelle. Il n’y a pas de problème avec les personnes, seulement avec l’environnement, ce dernier étant votre « patient » et devant être « diagnostiqué » et « traité ». Point final.

La définition des déficiences fonctionnelles de l’ONU (voir Johansson O, “Electrohypersensitivity: a functional impairment due to an inaccessible environment”, Rev Environ Health 2015; 30: 311-321) indique clairement que ma propre méconnaissance totale de la langue française est également une déficience fonctionnelle. Cela signifie-t-il que vous – selon les mêmes principes que pour l’électro-hypersensibilité – insistez pour que je sois envoyé chez un médecin/hôpital pour un traitement médical immédiat ? Suis-je également atteint d’une déficience neurologique ? Et si oui, quel sera le traitement pour moi ? Et je pose à nouveau la question : et pour les personnes électro-hypersensibles ?

Il est évident pour tout lecteur que vous n’êtes pas au courant du statut des déficiences fonctionnelles et du fait qu’elles ne sont pas considérées comme des maladies, qu’elles ne font l’objet d’aucun diagnostic officiel et que les seuls « traitements » à proposer sont des mesures d’accessibilité (c’est-à-dire par l’élimination, ou du moins une forte réduction, de l’électrosmog ambiant, en particulier dans les lieux ouverts au public) de l’environnement permettant à la personne souffrant d’une déficience fonctionnelle « de mener une vie égale dans une société fondée sur l’égalité » (cf. les lois des Nations unies sur les droits de l’homme).

J’espère que vous vous rendez compte que le projet de changement de statut de l’électro-hypersensibilité sera utilisé contre les personnes atteintes de déficience fonctionnelle électro-hypersensible – et pas seulement en Europe, mais partout dans le monde où certaines forces non démocratiques travaillent actuellement très dur pour que l’électro-hypersensibilité soit plutôt reconnue comme une pathologie, concomitante avec des traitements forcés, et peut-être avec un risque d’être plutôt pris en charge par des psychiatres et des psychologues… et donc de perdre leurs droits de l’homme… ce que les fournisseurs de l’initiative phare 2030 Hexa-X de la Commission européenne applaudiront très probablement bruyamment.

2. Qu’est-ce qui peut vraiment aider les personnes souffrant d’une déficience fonctionnelle, l’électro hypersensibilité ?

Il s’agirait d’un <<< Plan d’assistance aux personnes électro-hypersensibles >>> pratique, dont l’objectif principal serait de travailler sur les mesures d’accessibilité. Ce plan a l’avantage d’être efficace et progressif, en quelques étapes, bon marché et réalisable dans un court laps de temps, c’est-à-dire se débarrasser de la technologie sans fil, par exemple :

Interdire les smartphones, le WiFi et les autres appareils sans fil dans les lieux ouverts au public, à commencer par les hôpitaux, les cabinets médicaux, les bibliothèques, les bureaux municipaux et divers autres bâtiments et lieux, se débarrasser de l’internet mobile, etc. Chaque handicap fonctionnel est privé et personnel, et les mesures d’accessibilité doivent toujours être adoptées individuellement – aucune mesure moyenne, liée à un groupe, ne fonctionnera pour tout le monde.

Aujourd’hui, toute forme de technologie sans fil de remplacement n’est pas une solution. La seule technologie de télécommunication applicable à ce groupe de personnes souffrant de déficiences fonctionnelles est le câble entièrement blindé !

Dans le même temps, les cabines téléphoniques publiques doivent être réimplantées partout – certains endroits doivent l’être en priorité, les lignes fixes doivent être rétablies et l’Internet câblé doit être mis en place, en particulier dans les campagnes, là encore uniquement en concertation avec les besoins de la communauté des électro-hypersensibles, personne par personne.

Pas de zones blanches pour les personnes électro-hypersensibles. L’accessibilité n’est pas une réserve indienne classique, elle doit être établie partout.

Voici un conseil simple que toute personne assistant des personnes électro-hypersensibles doit appliquer : n’utilisez pas vous-même d’appareils sans fil, désactivez toutes les fonctions sans fil de tous vos équipements, y compris professionnels, parlez-en et montrez l’exemple. Et n’appelez JAMAIS un numéro sans fil ! (Le faites-vous ?)

Bien entendu, si nous considérons les personnes souffrant d’un trouble fonctionnel de l’électro-hypersensibilité comme des « personnes atteintes de troubles neurologiques », rien de tout cela n’est nécessaire ; il suffit de les envoyer chez … qui ? Un neurologue ? Un neurochirurgien ? Un psychiatre ? Un psychologue ? S’il vous plaît, précisez vers qui ils seront orientés dans ce cas ! (Comme vous le savez, il n’y a pas si longtemps, les personnes souffrant d' »illusions sur l’environnement » étaient lobotomisées et envoyées dans des asiles pour le reste de leur vie). Bien que je sois diplômé en neurobiologie/neuroscience, que j’aie été employé au très prestigieux Institut Karolinska en tant que professeur associé de neurosciences fondamentales et appliquées et que j’aie publié des articles scientifiques dans Science, Nature, Brain Research, Neuroscience, Neuroscience Letters et bien d’autres encore, je n’en reviens toujours pas.

Toute maladie donnée – comme vous voulez transformer la déficience fonctionnelle qu’est l’électro-hypersensibilité – devrait être considérée du point de vue des approches diagnostiques accréditées ainsi que des traitements potentiels, ces derniers étant également accrédités. Lesquels ? Des variantes dépassées de l’imagerie cérébrale et de la papaye séchée ? Ou des pieds trempés dans l’huile ?

Par ailleurs, un mot sur les codes CIM de l’OMS : Comme vous le savez, les codes CIM sont des codes internationaux de l’OMS qui sont censés être utilisés pour diagnostiquer une maladie, mais bien sûr pas une déficience fonctionnelle. Très récemment, l’OMS a ajouté trois nouveaux codes qui n’ont rien à voir avec une maladie, mais qui identifient votre statut vaccinal, ce qui pourrait être utilisé à des fins de traçage par les gouvernements, les parlements, les autorités sanitaires, la police, les autorités de contrôle des frontières, la CIA, le FBI, Interpol, etc. C’est ce que vous souhaitez également pour les personnes électro-hypersensibles souffrant d’un handicap fonctionnel ?

Ne vous méprenez pas, si l’ensemble de la communauté des électro-hypersensibles souhaite être médicalisée/psychiatrisée, je le respecte totalement. (Certaines personnes qui m’écrivent ont exprimé leur grande satisfaction quant à l’issue de la récente réunion de Bruxelles, et je me suis d’abord réjoui avec elles. Mais j’ai ensuite commencé à réfléchir… ). Toutefois, si une personne pense différemment, nous devons respecter sa déficience fonctionnelle ou son statut d’invalidité.

La récente réunion de Bruxelles m’a donné matière à réflexion, et je ne peux m’empêcher de penser à Pyrrhus d’Épire et à sa « victoire à la Pyrrhus » sur les Romains à Asculum, dans les Pouilles, en 279 avant J.-C. A l’avenir, j’espère que nous ne parlerons pas du 7 février 2023 comme d’une « victoire à la Rivasi »…

En tant que députée européenne, vous êtes responsable de vos décisions et de vos actions, et vous pouvez être jugée comme tel en cas de conséquences graves pour la communauté des électro-hypersensibles. Alors, quelle réputation voulez-vous emporter avec vous lors de votre dernière fête d’anniversaire… ?

Enfin, je vous écris ceci, chère Michèle, en espérant que vous le prendrez à cœur, avec un esprit ouvert, et que vous agirez en conséquence si vous le jugez nécessaire. Si ce n’est pas le cas, je reste votre ami. Mais soyez assurée que je ne fais pas cela pour vous ou pour moi, mais pour les personnes atteintes d’une déficience fonctionnelle, l’électro-hypersensibilité, et leurs proches. Ils sont beaucoup, beaucoup plus dans le besoin que vous et moi.

Avec mes meilleures salutations, et dans le plus profond respect, Stockholm, 28 février 2023.
Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées,
Olle

(Olle Johansson, professeur, retraité – mais toujours actif – de l’Institut Karolinska et de l’Institut royal de technologie, tous deux à Stockholm, Suède)

Source : Dearest Michèle (reçu par mail du Pr Olle Johansson, le 3 mars 2023 – traduction Deepl corrigée)
Pour contacter et soutenir le travail du le Pr Olle Johansson : https://research.radiation.dk/

3 réflexions sur « Lettre ouverte à Michèle Rivasi – Pr Olle Johansson, 28 février 2023 »

  1. Merci Mr le professeur ma fille a ce problème et elle est terrifiée à la pensée d’être un jour enfermée a cause de cette hypersensibilité.
    Recevez Mr le professeur mes respectueuses salutations,
    Mme NOCHEZ

  2. Merci pour la publication du texte intégral de la lettre du Pr Olle Johansson. Ses observations sont très importantes, il faut être attentifs toujours aux éléments qu’il signale.
    Cependant, je viens de regarder la vidéo de l’atelier du 7 février. Presque tous les participants ont été en contre du développement de la 6G (sauf Mr Peter STUCKMANN, DG Connect, qui présentait les perspectives, plans et projets de la Commission européenne, en ce qui concerne la Décennie Digitale et l’entreprise conjointe 6G-SNS). Un intervenant a parlé des travaux du Pr Johansson. Sous la vidéo YouTube, dans le texte de présentation, il n’y a plus les mots signalés pour le Pr.
    Je vous laisse le lien YouTube pour voir l’atelier : https://www.youtube.com/watch?v=P3vfamRy9Y0
    Cordialement Mme NASANOVSKY

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.